Weill est autant un OVNI de la musique du XXe siècle qu’il est le révélateur de ses enjeux, ayant traversé tous les courants, du postromantisme finissant à l’aube du postmodernisme (tout en ignorant superbement le sérialisme), ayant collaboré avec les meilleurs dramaturges, metteurs en scène, décorateurs, chorégraphes, producteurs, acteurs, chanteurs, ayant aussi cultivé tous les genres, avant d’affirmer en un credo existentiel que le théâtre était la forme la plus apte à parler au public. Opportuniste ou traître pour les uns […], matérialiste impénitent pour ceux que déroute ce profil de bon bourgeois habillé en rouge pâle, Weill rassemble sur sa personne une kyrielle de préjugés qui n’ont justement pour principal objectif que de lui dénier l’identité d’un compositeur comme les autres. […] Ce ne sont d’ailleurs pas un compositeur, encore moins un universitaire, mais un écrivain traducteur de génie, Boris Vian, et un chanteur, Léo Ferré, qui auront le mieux cerné son essence ; c’est à ce dernier qu’il faut laisser le mot de la fin : L’histoire de la musique est bonne fille et accueillante, je parle de l’histoire contemporaine. Le temps n’est ni bon ni accueillant. Ce qui assombrit, pour certains, l’auréole de Kurt Weill, c’est qu’il ait conçu son œuvre dans le milieu dit de la musique légère, quand il n’y a, comme chacun sait, que la MUSIQUE, la vraie, et le galimatias. (Extrait)
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